Le site personnel d’André Hautot, enseignant-chercheur en physique à l’université de Liège, propose depuis 2008 des billets mensuels consacrés à des personnalités ou thématiques musicales. On notera en particulier quelques articles très documentés consacrés aux compositrices femmes, actuelles ou passées.
Hautot note, à juste titre, que les exemples de femmes compositrices remontent au Moyen-Âge avec une vingtaine de trobairitz répertoriées. Il affirme (de façon peut-être un peu rapide) que la Renaissance n’a guère laissé de place aux femmes, et qu’il faut attendre le Baroque italien pour rencontrer les deux exemples les plus marquants : Francesca Caccini (fille du compositeur) et Barbara Strozzi. Il évoque également la grande claveciniste française Élisabeth Jacquet de la Guerre, à la fin du XVIIe siècle.
De fait, c’est en France que l’on trouvera un peu plus tard, à l’époque pré-romantique, plusieurs exemples de femmes compositrices : Hautot évoque le cas d’Hélène de Montgeroult ainsi que les très intéressantes Louise Farrenc et Louise Bertin ; l’on pourrait également mentionner Rose-Adélaïde Ducreux (fille du célèbre peintre rappeur Joseph Ducreux, et également peintre elle-même), Sophie Bawr (plus dramaturge que compositrice), Pauline Duchambge et Marie Bigot (toutes deux pianistes). Suivra la génération des Fanny Mendelssohn, Clara Schumann et autres Alma Mahler.
Reste un problème épistémologique et philosophique inhérent à toute énumération de ce type (le plus souvent établie par des commentateurs de genre masculin, au demeurant) : au nom de quoi serait-il pertinent de juxtaposer des écritures et époques aussi différentes ? Prétendre valoriser «les compositrices» tout en les circonscrivant d’une façon grossière (voire paternaliste) ne revient-il pas à anéantir le but même que l’on prétend poursuivre ? Ce questionnement pourrait paraître purement théorique ; il acquiert pourtant une douloureuse actualité en notre époque où des politiques de parité stricte, aux intentions louables et à la vue courte, ont permis à certaines auteurs de sortir d’un oubli injuste, mais conduisent également de nombreux lieux culturels à faire tourner en boucle une poignée de compositrices à l’écriture parfois paresseuse et médiocre.