... Apparemment oui. Un juge californien vient de décider, après de longues années de circonvolutions et de rebondissements, ainsi qu’un méprisable étalage de mauvaise foi de la part de l’éditeur Chappell et de la maison de disques Warner (indûment considérés jusque-là comme titulaires des droits), que la chanson la chanson «Happy Birthday To You» n’avait pas d’ayant-droit légitime et identifié : en d’autres termes, il s’agit d’une œuvre dite "orpheline", qui rejoint de facto le domaine public dont elle aurait dû relever depuis de trop nombreuses décennies.
Étrange destin que celui de cette chanson, probablement écrite à la fin du XIXe siècle par deux filles d’un pasteur presbytérien aux États-Unis sous l’intitulé «Good Morning To You» (on note d’ailleurs le compte différent des syllabes, qui signifie que le rythme caractéristique de la mélodie n’est qu’un ajout ultérieur). Difficile d’imaginer comment une mélodie aussi triviale et des paroles à ce point dépourvues d’originalité ont pu se faire passer si longtemps pour une «œuvre» originale digne de la «protection» du droit d’auteur -- non sans enrichir, ce faisant, une poignée de lointains descendants, d’éditeurs et d’industriels. (La rente annuelle due à «Happy Birthday» est estimée à 2 millions de dollars.)
Voir à ce titre (toujours en anglais) le fascinant travail de recherche conduit il y a quelques années par un universitaire américain :
http://papers.ssrn.com/sol3/papers.cfm?abstract_id=1111624
Si la musique était manifestement déjà dans le domaine public, l’incertitude demeurait jusqu’ici quant aux paroles, et en particulier à l’immense créativité ayant pu conduire à remplacer «good morning» par «happy birthday» (audace folle dont on conviendra qu’il est bien légitime que l’auteur et ses descendants soient récompensés financièrement jusqu’à la septième génération).
À ce titre, une incertitude demeure quant à la "version française" dont le traducteur reste à ce jour inconnu : rien, techniquement, n’empêcherait un hypothétique ayant-droit de continuer à rançonner le public francophone au prétexte que traduire «happy birthday to you» par «joyeux anniversaire», constitue une expression artistique hautement originale. Mais nous nous refuserons à imaginer qu’une telle farce puisse se jouer : les éditeurs et sociétés de gestion collective que nous avons la chance d’avoir en France, sont certainement au-dessus d’une telle mesquinerie.