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August 12, 2016

Vers une linguistique de la musique

À comparer des langages textuels (oraux et écrits), la musique reste à ce jour rétive à l’analyse linguistique et ses outils. Tout au plus disposons-nous de quelques moteurs de recherche dits «QbH» (query by humming, recherche en fredonnant) : Melodyhound (plus connu en tant que Musipedia) en est sans doute l’exemple le plus marquant. Plus récemment, la tribu des Shazam, Midomi et autres Name my tune, s’oriente davantage vers la musique de consommation industrielle. Au-delà de la prouesse technique qu’ils constituent en termes de traitement du signal, ces outils permettent également de trouver des silimitudes intéressantes entre des thèmes musicaux que l’on n’aurait pas forcément pensé à associer. Dans un sens nettement plus discutable, de tels algorithmes servent également aux nervis robotisés de l’industrie médiatique, à censurer de larges pans Web.

Le codage de la musique est un problème particulier à résoudre pour tous ces outils : du niveau moins conceptualisé (l’onde sonore) à des représentations intermédiaires (reconnaître des hauteurs, une courbe mélodique, voire une transcription sous forme de partition) ou même de haut niveau (reconnaissance indépendante de la tonalité, du tempo ou même de la métrique, analyse automatisée de la structure du discours musical), les possibilités d’analyse et de traitement sont évidemment très différentes -- comme on le sait depuis plus d’un siècle.

Pendant les années 1990, le format MIDI, nonobstant ses limites flagrantes, a permis l’édification de grandes bases de données telles que Classical Archives, CrestMuse ou MIDIZone, pour lesquelles existaient de nombreux moteurs de recherche. D’autres formats moins connus et plus spécialisés se prêtent également à l’archivage et au référencement : ABC pour les airs traditionnels populaires (exemples : 0, 1, 2, 3 en flash) ; ou encore MOD pour les musiques synthétiques de jeux vidéo et démos (exemples : 0, 1, 2, 3. Ces deux dernières décennies, des formats permettent de meilleures représentations conceptuelles de la musique : MusicXML (2004), XML-MEI (2011)... et, bien sûr, GNU LilyPond (depuis 1996).

Peachnote est un autre outil (signalé par notre collègue oumupien Martin Granger en mars 2013), qui fonctionne selon un principe similaire au Ngram Viewer de Google : fonctionnant principalement à partir de partitions numérisées (notons au passage que la reconnaissance optique de partitions est encore un domaine où l’analyse musicale est très en retard sur la linguistique textuelle), Peachnote permet de chercher des similitudes mélodiques ou harmoniques (et prochainement, rythmiques) sur un corpus conséquent et -- ce n’est d’ailleurs pas là la moindre de ses nouveautés -- authentiquement diachronique.

Développé depuis 2007 par Vladimir Viro, un universitaire allemand, Peachnote est mis à disposition avec son code source et ses données brutes (même si le lien est actuellement indisponible). Sans nul doute, cet outil est appelé à devenir l’allié essentiel des chercheurs, musiciens et compositeurs avertis.