La rentrée 2016 marquera en Suisse une victoire symbolique majeure dans l’enseignement de la Formation Musicale. C’est alors qu’entrera en application la modification de la Constitution Fédérale helvétique, proposée par une initiative populaire dès 2007 puis retouchée par le Parlement et approuvée par la population (à une large majorité) lors de la votation du 23 septembre 2012. Se trouve ainsi ajouté à la constitution fédérale un nouvel article (le désormais célèbre 67a), qui dispose :
La Confédération et les cantons encouragent la formation musicale, en particulier des enfants et des jeunes.
Dans les limites de leurs compétences respectives, la Confédération et les cantons s'engagent à promouvoir à l'école un enseignement musical de qualité. Si les efforts des cantons n'aboutissent pas à une harmonisation des objectifs de l'enseignement de la musique à l'école, la Confédération légifère dans la mesure nécessaire.
La Confédération fixe, avec la participation des cantons, les principes applicables à l'accès des jeunes à la pratique musicale et à l'encouragement des talents musicaux.
Au-delà de son aspect généralement sympathique, reconnaissons le fin ouvrage d’ambigüité politicienne que constitue ce texte : maintenant un savant équilibre entre prescription étatique et indépendance des cantons, entre grands principes généreux et formulation suffisamment vague pour n’engager concrètement à pas-grand-chose. On n’échappe pas à quelques présupposés idéologiques plus ou moins discutables (orientation jeuniste, inclusion de la musique dans l’enseignement général de masse -- même si des initiatives se mettent en place pour envisager également l’apprentissage musical en-dehors de l’école), dont le moindre n’est pas cet intitulé de «Formation Musicale» lui-même, probablement emprunté à la doxa française où il a été brandi et imposé pour balayer le mot «solfège» déclaré irrémédiablement ringard par Qui De Droit -- et qui ne laisse pas, depuis lors, de donner lieu à d’innombrables interrogations et spéculations.
Peu importe, au fond : il ne peut être que réjouissant de voir une telle mesure recueillir un aussi large soutien dans la population (à l’exception de l’extrême-droite et des formations opposés à l’État fédéral), même si ce n’est qu’à titre symbolique et parfaitement inoffensif d’un point de vue social. La Formation Musicale figure donc maintenant dans le texte de la Constitution Fédérale, ça ne mange pas de pain et ça fait plaisir à à-peu-près tout le monde -- du moment qu’on ne touche pas à l’essentiel : ladite constitution, rappelons-le, débute encore aujourd’hui par l’exhortation : «Au nom de Dieu Tout-Puissant!»