Les amateurs de sport et/ou de terroirs (catégories excluant toutes deux l’auteur de ces lignes, mais faisons comme si) savent qu’une des particularités de la Pelote basque est que les points (dont le décompte est hérité du jeu de paume : 15, 30, 40) étaient autrefois annoncés en chantant.
On en trouve ainsi quelques traces dans des publications anciennes : une planche de la bande dessinée Sylvain et Sylvette parue dans l’illustré Fripounet et Marisette en 1960, le manuel de conversation française French in action daté de 1985 (leçon 16/5), la Revue bleue de 1931 (page 92), ou encore -- et surtout -- cette brève archive audiovisuelle (ici en vidéo) de 1962.
Las : nulle mention de cette tradition vocale (pourtant remarquable et, à notre connaissance, unique) dans la page Wikipédia consacrée à ce sport, ni sur le site de sa fédération française, ni dans l’inventaire du Patrimoine culturel immatériel présenté par l’État français, ni dans les médias ni même sur YouTube. Il faut dire que le sport lui-même a bien changé : tout au long du XXe siècle, il est devenu plus compétitif et professionnalisé ; les frontons publics ont cédé le pas aux stades clos et protégés par des vitres blindées, le port du casque et de lunettes de protection est devenu obligatoire à la fin du siècle ; il n’a eu de cesse, enfin, de se subsumer corps et âme dans cet antre de profit industriel et de corruption éhontée qu’est le milieu olympique. L’on peut comprendre, dès lors, que pousser la chansonnette à chaque point marqué ne soit plus guère de mise.